Dernière mise à jour le 04 novembre 2024
Signer un bail, accepter la réalisation de travaux, accorder la cession de bail… Autant d’autorisations que peut réaliser le propriétaire dans le cadre d’un bail à ferme. Lorsqu’il y a démembrement de propriété, à qui reviennent ces droits ?
Pour rappel, la pleine propriété d’un bien est constituée à la fois par la nue-propriété et par l’usufruit.
Le démembrement de propriété intervient généralement à la suite d’une donation ou d’une succession. C’est par exemple le cas, lorsqu’un propriétaire garde l'usufruit et donne la nue-propriété à l’un de ses enfants. L’usufruitier a le droit aux fruits (les revenus) et le droit « d’usus » (jouir du bien) ; quand le nu-propriétaire a le droit de disposer du bien.
Aussi, lorsque la propriété est affermée, on peut s’interroger sur les droits accordés au nu-propriétaire et à l’usufruitier sur la gestion du bail à ferme.
Conclure un bail rural
L’usufruitier ne peut sans le concours du nu-propriétaire donner à bail un fonds rural. A défaut d’accord du nu-propriétaire, l’usufruitier doit obtenir une autorisation de justice (article 595 du code civil). Le bail qui serait conclu par l’usufruitier seul est nul à l’égard du nu-propriétaire, et celui-ci peut poursuivre la nullité sans attendre la fin de l’usufruit ou la fin du bail. Il a cependant un délai de 5 ans pour agir en nullité à compter de la date où il a eu connaissance du bail.
Le fermier doit donc se montrer vigilant sur la qualité de son bailleur.
Le consentement du nu-propriétaire pour la conclusion du bail ne lui confère toutefois pas la qualité de co-bailleur : La qualité de bailleur n’appartient qu’à l’usufruitier.
La jurisprudence considère que l’accord du nu-propriétaire est exigé pour la conclusion du bail rural, mais pas pour ses renouvellements qui sont tacites.
Agrément de la cession de bail
L’usufruitier peut autoriser seul la cession du bail à un descendant du preneur. Il n’a pas à rechercher le consentement du nu-propriétaire. Et le nu-propriétaire ne peut contester cette cession, quand bien même à la fin de l’usufruit, c’est lui qui deviendra le bailleur du descendant du preneur.
Autorisation de travaux au preneur
S’agissant des travaux d’amélioration, ils sont valablement autorisés par l’usufruitier. L’autorisation du nu-propriétaire n’a pas à être recherchée. Cependant, il peut être utile de solliciter le nu-propriétaire lorsque les travaux d’amélioration grèvent le fonds d’une lourde charge. A la sortie de ferme, la charge de l’indemnité pèse sur l’usufruitier qui a seul la qualité de bailleur.
Congé
En sa qualité de bailleur l’usufruitier seul délivre valablement congé, et ce, sans le concours du nu-propriétaire. Il en est de même pour une demande de résiliation du bail, quelle que soit la cause invoquée.
Fiscalité
L’usufruitier percevant les fermages doit les déclarer fiscalement au titre des revenus fonciers. Il doit régler l’impôt sur le revenu et les prélèvements sociaux (CGS, CRDS). C’est également l’usufruitier seul qui est redevable du paiement de la taxe foncière. Le paiement de l’IFI lui incombe en principe pour la valeur du bien en pleine propriété (hors bail long terme qui bénéfice d’une exonération sur la
valeur du bien). Dans certains cas limitativement énumérés par le fisc, le nu-propriétaire et l’usufruitier sont imposés séparément sur la valeur de leurs droits respectifs, selon une répartition qui dépend de l’âge de l’usufruitier par référence à un barème fiscal.
Charge des travaux
Dans le cadre d’un bail à ferme, le bailleur est tenu de supporter « toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que locatives » (article 1719 du code civil).
Les articles 605 et 606 du code civil définissent la répartition des charges entre usufruitier et nu-propriétaire. Ainsi, l’usufruitier n’est tenu qu’aux réparations d’entretien. Les grosses réparations demeurent à la charge du nu-propriétaire. Ce sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières. Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier. Toutes les autres réparations sont d'entretien.
Chambre d’agriculture de l’Allier
Service Juridique Territoires / Mars 2022
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